Dr Boris Cyrulnik « Aujourd’hui, lutter contre la mort est une valeur prioritaire »


Dr Boris Cyrulnik, Vice-Président, Neuropsychiatre, Directeur d'enseignement à l'Université.

Le docteur Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, directeur d’enseignement à l’Université, vice-président de la Ligue Française pour la Santé Mentale a donné une conférence en ligne « Peut-on parler de résilience collective? », animée par Bernard El Ghoul, délégué général de Sciences Po Alumni.

Regardez la conférence en replay  https://youtu.be/j1XjP5iaiA8

Ses propos ont également été recueillis par Florian Darras, Albane Demaret et Sandra Elouarghi pour Émile, le magazine trimestriel publié par l’Association des anciens élèves de Sciences Po Paris. Extraits de cet entretien passionnant :

La première interrogation concerne la parole dont vous connaissez le pouvoir mieux que quiconque. Depuis deux mois, la société entière ne parle que d’une chose : l’épidémie de Covid-19. Cette forme de répétition excessive n’est-elle pas anxiogène pour la population ? (…)

(…) Vous avez souligné la parole, parce que la parole c’est créer un monde, le monde des mots. On fabrique une représentation verbale. On élabore, du sens latin du mot ex labore, c’est-à-dire qu’on travaille, on est des laboureurs : on va sur le terrain pour chercher à comprendre ce qui s’est passé, et pour chercher quelques solutions pour se remettre à vivre.(…)

Dans votre dernier ouvrage justement, La nuit j’écrirai des soleils, vous évoquez des « tuteurs de résiliences ». Qui sont-ils et ont-ils été utiles pendant la période de confinement ?

(…) C’est finalement ce qu’on a découvert pendant le virus : des petits métiers dont on ne soupçonnait pas l’importance et qui se sont révélés essentiels : les éboueurs, les postiers, ceux qui allaient aider les personnes âgées à domicile, et surtout bien sûr, les infirmières, les aides-soignants dans les hôpitaux, qui ont été d’un courage physique et d’une générosité qu’on trouve toujours dans les catastrophes. S’il y a des traîtres ou des pervers qui existent, l’immense majorité de la population reste courageuse.

On a célébré pendant le confinement, tous les soirs, à 20h, les soignants, nouveaux héros de notre société. Au-delà de cet hommage légitime et spontané, est-ce que notre société avait besoin de communier autour d’une figure symbolique, spécifique ? (…)

(…) Merci les soignants. Ce ne sont pas des héros, ce sont des gens qui ont très bien fait leur travail. Donc je pense que quand le gouvernement veut leur donner des jours de vacances supplémentaires, c’est très bien, ils le méritent. Mais quand on veut donner la légion d’honneur en disant que ce sont des héros, non. Ils ne voulaient pas mourir, ils voulaient sauver des malades, faire leur métier.

Vous avez commencé à évoquer tout à l’heure le « monde d’après », dont on a beaucoup entendu parler (…). Faut-il faire attention aux imprécations messianiques qui nous annoncent des lendemains qui chantent ?

(…) Je prends pour image la métaphore de l’étoile du berger, qui indique la direction. Cette dernière doit rester au ciel : il faut aller dans sa direction, sans se séparer du réel, qui existe bel et bien.(…)

Lire cet entretien dans son intégralité https://www.emilemagazine.fr/article/2020/5/28/boris-cyrulnik-entretien-coronavirus

Nous remercions Maïna Marjany, responsable éditorial d’Émile magazine, pour son aide.